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Ils ont peint à Puteaux - 1849- Albert LEBOURG


Par Jean-François Martre


Né le 1er février 1849 à Montfort-sur-Risle et mort le 6 janvier 1928 à Rouen. Peintre impressionniste ayant habité et peint à Puteaux.

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Portrait d'Albert Lebourg, 1867, par son ami strictement contemporain Philippe Zacharie, avec lequel il a fait ses études de peinture à Rouen auprès de Gustave Morin - Fondation Custodia, collection Frits Lugt, Paris.

Albert Lebourg a la chance de côtoyer la nature dès son enfance en Normandie, suivant son père, greffier de justice et géomètre, lors des ventes et des arpentages, puis durant ses études à Évreux, où l'on incite les élèves à se promener dans les fôrets et les champs.
Il fut l'élève de Gustave Morin, directeur de l'école municipale de peinture et de dessin de Rouen (futur conservature du musée de Rouen en 1865).
Il a 23 ans, en 1872, quand le collectionneur M. Laperlier lui propose un poste de professeur de dessin à la société des Beaux-Arts d'Alger où il restera cinq ans. Quelques années d'évasion où il se lance véritablement dans la carrière de peintre saisissant dèjà sur le vif les variations de couleurs et de lumières. Entre temps, il rentre en France et se marie le 27septembre 1873 avec Marie Guilloux (Paris 11/07/1855 - Rouen 3/08/1894). De retour à Alger avec son épouse, il rencontre le coloriste lyonnais Jean Seigmartin (1848-1875) qui lui révèle le secret de la peinture moderne. Seigmartin s'évertuait à rendre des effets ton sur ton : un arabe en burnou blanc sur un cheval blanc contre un mur blanc. Cet exercice marqua Lebourg et sous son influence, il s'exerça à peindre un seul et unique motif sous différentes qualités de lumière, d'une manière analogue à ce que fit Monet plus tard.
De retour en France, le marchand de tableaux Portier lui fait connaître les nouveaux milieux artistiques. Il se noue d'amitié avec Sisley, et participe à la quatrième exposition impressionniste de 1879 avec dix tableaux et en 1880 à la cinquième, et s'installe à Paris dans le quartier des Gobelins dans le but de préparer le concours de professeur de dessin de la Ville de Paris. Il y renonce pour se consacrer à la peinture. Entre 1884 et 1886, il fait plusieurs séjours en Auvergne, en particulier sur le site de Pont-du-Château sur lequel y reviendra très souvent.



1886 - 1895, il s'installe 15 avenue de la Défense à Puteaux où il a un atelier.
Durst habite au 51 à la même époque.
La liste de recensement de 1891 indique page 153 qu'il habite au n°15 de l'avenue de la Défense. Par contre attention aux orthographes des noms et au report des renseignements :
il vit avec sa femme Marie Guilloux (Guillaume !), 36 ans, sa belle-mère (Arthur Guillettre ?), 78 ans et une jeune domestique de 20 ans Célérine Gueroz.
En fait, il s'agit de sa mère qui s'appelle Florence-Françoise-Esther GUEULETTE, elle était de Noyon et vivait avec eux à Puteaux (née en 1815).
Sa belle-mère habitait Versailles.


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Catalogue raisonné de Léonce Bénédicte - Dessin signé Paris 1879.

On trouve de nombreuses lettres d'Albert Lebourg aux archives de la Fondation Custodia dont celle-ci où il est question de quelques soucis de mise en bouteille du vin reçu en tonneau, pour le prix d'un tableau et aussi de l'installation et de la description d'une belle horloge dans l'appartement de Puteaux entourée de deux Sisley, d'un Corot et d'un Narcisse Berchère.



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Les rives de la Seine à Puteaux, Affiche - ebay

Il n'y a pas encore de quais, mais l'ancien chemin de halage est devenu lieu de promenade. On est du côté du pont de Neuilly car derrière la péniche on voit le bateau lavoir. Le pont de Puteaux construit en 1895 n'apparaît pas sur ce tableau qui date d'avant 1890.



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Les bords de Seine à Puteaux - dessin au lavis, 21x30cm - Coll. Particulière Musée Fournaise, exposition 2002

La Seine entre Paris et Rouen est son axe de cour. C'est un artiste de son temps ; comme tous ses contemporains, il s'interesse à la représentation de la réalité fugace et du mouvement ainsi qu'à la peinture en plein air. Toute son attention est attirée par les ciels et les eaux, les buées et les reflets, les saisons et la neige.

Il circule et peint sur toute la petite et la grande banlieue parisienne, suivant la Seine depuis Paris et ses ponts, il plante son chevalet à Boulogne Billancourt, Meudon, Puteaux, Courbevoie,.
Voici ce qu'il dit :
« Les environs de Paris, çà m'a l'air encore de ce qu'il y a de plus beau par moments. Au pont de Neuilly, je prends le tramway de Saint-Germain et vais vers le belles localités des bords de Seine : Nanterre, Rueil, Chatou, Bougival, Marly, Port-Marly. C'est là une mine de motifs et de très beaux paysages.
Ces pays avaient été ravagés par la guerre de 1870, mais il y avait vingt ans que c'était passé et les arbres avaient déjà pu reprendre un nouvel essor et étaient en plein dans leur végétation ».
« Toute cette partie des environs de Paris est assez tranquille. Ce sont des parages qui ont déjà été visités par Sisley, par Monet et Pissaro. Dans l'œuvre des maîtres on retrouve les motifs de ces beaux endroits. Je ne sais pas ce qu'ils seront plus tard, ces beaux paysages, mais je suis certain qu'ils ne seront jamais aussi beaux que je les ai vus.
J'ai donc connu le paysage de la banlieu parisienne dans une belle période. »


Peintre de plein air, il prenait donc le tramway au pont de Neuilly qui est encore le pont de Perronet, modifié pour laisser passer la tramway de Paris à Saint-Germain en Laye.
Chevalet, toile, vêtements de pluie et chapeau pour le soleil, boite de peinture au dos. Il peint sur le motif, mais termine souvent dans son atelier.
En 1892, il confie :
« Je vais peindre beaucoup au bord de la Seine du côté de Courbevoie, de Puteaux et de Suresnes, où souvent je prends le bateau pour aller à Paris ». Heureux temps où l'on pouvait se déplacer en bateau mouche.
Comme tous les impressionnistes, il a fait des séries du même motif soit parce qu'un amateur souhaite acquérir une version, soit qu'il veut rendre un autre effet (neige, coucher de soleil.). C'est le cas avec ces tableaux du Pont de Neuilly pris depuis Courbevoie.



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Tirée du catalogue raisonné de Bénédicte
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Courbevoie et Le pont de Neuilly, neige - collection particulière, sotheby's 2022
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Courbevoie et Le pont de Neuilly - Musée d'ïle-de-France - Château de Sceaux
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La rampe et les maisons de Courbevoie à l'entrée du Pont de Neuilly et de l'autre côté les maisons de Puteaux. Entre les deux l'avenue de la Défense où il habite.
"https://fr.artsdot.com/@@/ARJBMU-Albert-Charles-Lebourg-(Albert-Marie-Lebourg)-Maisons-à-le-entrée-à-l-Pont-à-Neuilly"

Il assiste aux transformations du paysage urbain que ce soit à Paris ou en banlieu, peignant sur le vif l'évolution du paysage et de la société. Comme ici avec la destruction du Bas-Meudon et la construction du port industriel.


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La construction du port de Meudon - vente Herbette à Doullens, 17/12/2017

Il voyagera encore en Hollande et en Suisse, mais il préfère ses vagabondages sur la Seine et la Normandie.

Marie Guilloux, son épouse décède à Rouen le 3 août 1894. C'est vers sa belle-famille qu'il se tourne pour être soutenu dans cette épreuve.

Après quelques années passées dans son nouvel atelier rue de Poissy à Paris, il retourne à son domicile rouennais, 2 quai du Havre, qu'il a acheté en 1892 et à partir duquel il sillone la région et notamment le village de La Bouille au bord de la Seine où il réalisera une grande production de tableaux. C'est de La Bouille qu'il avait, dans son enfance, pris le bateau pour monter à Paris.



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Le bac à la Bouille près de Rouen.

En 1895 et 1897, il fait deux séjours en Hollande où il se sent chez lui et est heureux de peindre. Il se met à l'aquarelle et au lavis. Voici ce qu'il dit :
« C'est le seul moyen de dessin de ce pays-ci, où tout est fugace, rapide, où la nature est un fond, mais où le tableau se fait et se défait par le bateau qui passe et par le nuage qui vole. »
Il revient avec cinquante-deux toiles de ces voyages.

Il voyage, visite les musées, Turner à Londres en 1900, Bruxelles en 1901. En 1902, il fait une cure en Suisse et se réessaye à nouveau à peindre la montagne, notamment à Sion.



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Il partage sa vie entre Rouen et ses domiciles parisiens successifs, rue de Clichy, rue de Pontoise et rue de Poissy.
En 1921, alors qu'il vient de se remarier avec sa belle-sour Madame Alice Guilloux, il est victime d'un accident cérébral et en sort hémiplégique. Il cesse de peindre en 1925 et meurt en 1928 au terme d'une douloureuse maladie. Il laisse une production de plus de 3000 tableaux.

Sur cette page du journal l'Illustration du 14 janvier 1928, un article « avis de décès » dans lequel on a un autre dessin du pont de Neuilly vu de Courbevoie.



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Promu au grade de chevalier de la Légion d'honneur en 1903, il sera élevé au grade d'officier en 1924.



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Dans le catalogue raisonné de Léonce Bénédicte, on relève :
Puteaux - 6 œuvres
Pont de Neuilly - 11 œuvres
Courbevoie - 3 œuvres
Suresnes - 10 œuvres
Nanterre - 3 œuvres

Titre des œuvres sur Puteaux relevées dans le catalogue raisonné
892 - La Seine à Puteaux 1888/1889
993 - Bord de Seine à Puteaux 1884
1151- La Seine à Puteaux, matinée de printemps, mai 1899 (exposition Lebourg de 1918 n°186)
1176 - avenue de la Défense à Puteaux, effet de soleil après la pluie
1182 - avenue de la Défense à Puteaux après la fonte des neiges, en hiver. Étude
2129 - Bord de Seine à Puteaux : matin d'été. A droite une route longe la berge que domine des arbres. Des péniches sur la Seine et, à gauche, le bois de Boulogne. Ciel clair légèrement brumeux. S.à d. et daté : 1893. Ancienne collection du docteur Joal

Site à consulter :
- Albert-lebourg.org
- amcp27.fr site de l'Association Montfort Culture et Patrimoine

Livres et catalogues :
- Albert Lebourg, impressionniste au fil de l'eau -Musée Fournaise catalogue de l'exposition 2002
- Catalogue raisonné de Léonce Bénédicte
- Albert Lebourg par François Lespinasse, 1983
- L'école de Rouen de l'impressionnisme à Marcel Duchamp 1878-1914



J.F.M. - 09/2022